Métamorphoses cannoises
Bien loin de l’imaginaire festivalier des limousines longeant la Croisette, le bus est un des modes de transport utilisé par les festivaliers pour se rendre dans le centre de Cannes. Considéré comme un transport populaire, le bus relève plus du registre du quotidien que de celui du merveilleux et le choix de ce mode de déplacement témoigne avant tout de capacités économiques. Mais, ici plus qu’ailleurs, les efforts consentis pour transformer la réalité à l’image du rêve cannois signifient l’investissement cinématographique que le festival provoque dans les pratiques de ses publics.
Le bus constitue l’une des premières prises d’autonomie enfantine et le reste jusqu’au permis de conduire, encore aujourd’hui symbolique du passage à l’âge adulte. Pour les festivaliers logés en périphérie cannoise et souvent arrivés en train, il permet de retrouver cette autonomie dans les déplacements d’avant la voiture. Dans ce qu’il représente et parce qu’il évite de rentrer à pied, ce dispositif témoigne d’une préoccupation du devenir des publics au-delà de la zone festivalière et d’une volonté de prendre soin. Les bus cannois, et particulièrement ceux de nuit, voient ainsi cohabiter robes de soirée et des tenues de plage et permettent aux festivaliers de se laisser le temps de se transporter dans le festival, le temps de la métamorphose.
A Cannes, quand les navettes des résidences cannoises terminent leur service et que l’ambiance de la Croisette correspond le plus à l’image que l’on s’en fait, le festival opère son pouvoir de mise en scène du quotidien et transforme les citrouilles en carrosses dans lesquels on croise des aller de princesses en devenir et des retours de cendrillons ayant quitté leurs escarpins pour le confort des ballerines.
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Sous la direction d’Emmanuel Ethis, Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse
(Centre Norbert Elias, équipe Culture et Communication)